Prothèses mammaires : décryptage du syndrome ASIA

Par Dr Thierry Ktorza / Modifié le 20 janvier 2022

Prothèses mammaires : décryptage du syndrome ASIA
Décryptage du syndrome ASIA

Aujourd’hui, plus de 500 000 femmes portent des implants mammaires en France, que ce soit pour des raisons esthétiques ou dans le cadre d’un processus de reconstruction qui suit une chirurgie liée à un cancer du sein. Depuis quelques années, l’apparition du syndrome ASIA suite à la pose d’implant mammaire continue de faire écho. Le point sur ce phénomène assez particulier.

Le syndrome ASIA : de quoi s’agit-il exactement ?

Le médecin et chercheur israélien spécialisé dans le domaine de l’auto-immunité Pr Yehuda Shoenfeld définit le syndrome ASIA ou « Autoimmune Syndrome Induced by Adjuvants » comme le résultat de différents dysfonctionnements immunologiques provoqués par l’exposition à un adjuvant.

D’après les associations de patientes, mais surtout les informations qui circulent sur les réseaux sociaux, son apparition présente un lien étroit avec les implants mammaires. Certaines substances chimiques présentes dans la composition des prothèses mammaires seraient responsables du développement d’une maladie auto-immune et/ou inflammatoire. Ce constat reste assez similaire à la présence d’adjuvants comme l’aluminium que l’on retrouve dans les vaccins.

Dans les formes les plus avancées, le développement de certaines maladies auto-immunes comme la sclérodermie, la fibromyalgie, le lupus ou le rhumatisme articulaire seraient associé au syndrome ASIA.

La composition des implants remise en cause

Aujourd’hui, les spécialistes de la chirurgie esthétique et réparatrice utilisent deux types d’implants mammairesque sont les prothèses préremplies de gel de silicone, avec une enveloppe ou paroi lisse ou à paroi texturée.

À titre de rappel, le silicone consiste en une huile de synthèse élaborée à partir du silicium, un élément chimique semi-métallique. Il faut tout de même savoir que l’entreprise américaine Dow Corning Corporation est l’une des enseignes pionnières dans la divulgation d’une grande majorité des éléments constitutifs des implants mammaires. La plupart des prothèses en silicone compterait une trentaine de composants, avec des éléments sujets à controverse comme le plomb, un certain nombre de neurotoxines comme la cyclohexanone, le méthyle éthyle cétone et le chlorure de polyvinyle. À ces éléments constitutifs s’ajoutent quelques solvants de nettoyage et des substances carcinogènes.

Les prothèses mammaires salines ont rapidement remplacé les modèles fabriqués en silicone, notamment lorsque ces derniers ont été interdits sur le marché pendant une certaine période. Dans le courant des années 90 aux États-Unis, plusieurs actions juridiques collectives ont été menées dans le but de dénoncer les risques que présente un certain nombre de prothèses mammaires ainsi qu’un grand nombre de fabricants.

Ce n’est qu’en 2001 que les modèles en silicone ont été de nouveau autorisés sur le marché français. Bien que d’après certains experts, les implants salins soient des prothèses mammaires moins dangereuses avec des risques sur la santé réduits en comparaison avec les prothèses en silicone. En effet, en cas de rupture de la poche, le sérum physiologique utilisé dans la conception de l’implant sera tout simplement absorbé par l’organisme. Le paradoxe est qu’actuellement aucun laboratoire ne commercialise d’implants salins car le risque de rupture de ces implants avoisine les 30% à 3 ans. Ce taux de rupture est tout à fait inacceptable car à l’origine de très nombreuses ré interventions chirurgicales. C’est la raison pour laquelle un moratoire a été promulgué en 2001 pour autoriser à nouveau les implants en gel de silicone.

D’après les recherches menées sur le syndrome ASIA, aucune distinction entre les implants en silicone et ceux en sérum physiologique n’a été observée. Toutes les personnes sujettes à ce type de réaction portent les deux différents types de prothèse. À la grande surprise de tous, les modèles salins considérés comme moins dangereux présentent même des complications spécifiques supplémentaires, comme le développement de levures et de moisissures.

Compte tenu de tous ces faits, la Food and Drug Administration américaine a tout de même publié en 2006 quelques rapports qui portent sur la sûreté des prothèses mammaires, et ce, malgré l’absence de toute information publique qui indique leur composition exacte. Un accent a même été mis sur la présence de quelques matières premières à base de métaux lourds comme le mercure ou le plomb.

Un phénomène de migration de certains composants des implants

La migration de certains éléments constitutifs des implants mammaires explique la polémique autour du syndrome ASIA chez certaines patientes. Il s’avère en effet que le silicone ainsi que certaines toxines ont tendance à migrer hors des prothèses et à se répandre dans l’organisme à travers le sang et le système lymphatique. Des traces de silicone provenant d’implants rompus ont d’ailleurs été identifiées dans la cavité des sinus de quelques personnes.

Il faut savoir qu’une exposition au silicone est susceptible de perturber les fonctions immunitaires, endocriniennes et hormonales. Un impact sur les neurotransmetteurs n’est pas non plus à écarter. Le silicone est en effet capable de stimuler la production de certains agents oxydants, ce qui entraîne rapidement une modification, voire une destruction des parois cellulaires, de la structure de l’ADN ainsi que des systèmes enzymatiques.

Syndrome ASIA : quels symptômes ?

À l’instar des autres maladies auto-immunes, le syndrome ASIA se manifeste par des symptômes variés, pour ne citer que lafatigue chronique, les troubles cognitifs, de la fièvre, l’inflammation des ganglions lymphatiques, des myalgies ou des arthralgies.

D’autres signes plutôt « courants » comme la perte de cheveux, une hypersensibilité aux produits chimiques, des troubles de la digestion ainsi qu’une intolérance et/ou une allergie à certains aliments peuvent également laisser supposer la présence du syndrome ASIA.

Certaines femmes sont par ailleurs victimes d’un déséquilibre de la flore intestinale et du système immunitaire. À cela peut s’ajouter une forte dominance de l’œstrogène qui, combinée à d’autres facteurs, est susceptible de favoriser le développement des candidoses.

La capacité à imiter l’œstrogène figure parmi les particularités du silicone. En reproduisant les caractéristiques de l’hormone féminine, il crée des déséquilibres sur le plan hormonal tels que l’hyperœstrogènie ou un dysfonctionnement de la thyroïde. Comme chez la plupart des maladies auto-immunes, une prédisposition génétique risque de favoriser le développement du syndrome ASIA.

Une bonne préparation avant une augmentation mammaire

L’immense majorité des interventions d’augmentation mammaire ne se terminent pas par l’apparition du syndrome ASIA et ne nécessitent pas le retrait des implants mammaires. Cependant, l’augmentation mammaire par implants mammaires n’est pas non plus une intervention à prendre à la légère. Cette intervention peut nécessiter plusieurs consultations avec le chirurgien avant de prendre une décision. À cela s’ajoute un délai de réflexion légal de 15 jours minimum.

Les discussions préalables avec le chirurgien seront l’occasion de lever le voile sur tous vos questionnements. Vous pourrez ainsi prendre connaissance des avantages et des risques de ce type d’intervention. Bien évidemment, le respect des consignes du chirurgien avant, pendant et après l’opération est aussi primordial.

En conclusion, il est nécessaire de savoir que le lien entre le syndrome ASIA et les implants mammaires n’a jamais encore été clairement identifié. Même si la relation entre les deux reste tout à fait suspecte, rien ne permet encore à l’heure actuelle d’incriminer de façon certaine les implants mammaires dans la multitude de signes cliniques du syndrome ASIA. En particulier, le retrait des implants mammaires ne pourra jamais garantir la disparition ou même l’amendement de la symptomatologie incriminée. Tous les individus ont un taux de silicone dans le corps de plusieurs mg. Il est nécessaire de savoir que chaque prélèvement sanguin inocule du silicone dans l’organisme car les aiguilles sont toutes recouvertes de silicone par exemple. Il incombe donc à chacun, aidé par votre chirurgien, de faire le point sur la symptomatologie présentée et de ne pas céder à la panique pour ne pas regretter d’avoir choisi un retrait des implants mammaires.

A propos du Docteur Thierry Ktorza

Dr Ktoza

Le Docteur Thierry Ktorza, chirurgien plasticien à Paris, fait partie des 700 chirurgiens qualifiés en chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique par le conseil de l’ordre des médecins. Vous envisagez une intervention de chirurgie esthétique et vous vous posez des questions ? Le Docteur Ktorza répond à vos questions sous 24 heures par email ou par téléphone au 01 44 05 13 15. Il vous accueille également dans son cabinet au 25 rue Raynouard 75116 Paris (dans le 16ème arrondissement près de la rue de Passy).

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